Le problème :

Les Sourds canadiens ne reçoivent aucun enseignement et ne sont formés pour participer à la politique; ils trouvent le système politique canadien difficile à bien comprendre; leur taux de participation et d’activité politique est très bas; les forums et les réunions politiques/publiques leur sont habituellement inaccessibles.

Notre position :

Les Sourds canadiens doivent recevoir la formation, les informations et les occasions de devenir des participants actifs et bien informés en politique.

En 1992, L’Association des Sourds du Canada – Canadian Association of the Deaf entreprit la toute première enquête et étude canadienne portant sur la participation et l’activité politiques des personnes Sourdes et handicapées. Les résultats révèlent que des personnes Sourdes en particulier sont socialisées par la famille, l’école, la société et les médias à être passives, manquent des connaissances en politique, et sont indifférentes à ce sujet et convaincues que « la politique est quelque chose des entendants ».

Ces résultats ont été confirmés par la suite dans une thèse de maîtrise qui a été publiée sous le titre The Politics of Visual Language: Deafness, Language Choice, and Political Socialization (James Roots, Carleton University Press, 1999).

La formation politique commence par la famille. Les enfants Sourds sont habituellement laissés hors des négociations et des prises de décision familiales, même lorsque la décision qui est prise en est une qui affecte seulement cet enfant sourd, telle que les décisions à savoir si on lui enseignera la langue des signes, et s’il recevra son instruction dans une école centralisée pour les Sourds ou dans les écoles ordinaires. La conséquence en est que l’enfant en vient à croire qu’il n’a aucun pouvoir sur son propre destin et n’a aucune voix dans les décisions affectant sa vie.

Les écoles renforcent ce sentiment de l’inefficacité (impuissance) politique. Les leçons peuvent être enseignées dans des langues qui ne sont pas la langue propre de l’enfant, c.-à-d. en anglais ou en français au lieu d’être enseignées en ASL ou en LSQ: cela montre à l’enfant que sa langue n’a aucune reconnaissance politique. Des modèles à imiter, enseignants, et administrateurs Sourds ne sont pas présents, sauf dans les écoles provinciales pour les Sourds: cela montre à l’enfant que les personnes Sourdes n’ont aucun rôle politique. On n’enseigne pas la culture et l’histoire Sourdes: cela montre à l’enfant qu’il n’a aucune validité politique. Même la politique au niveau des conseils étudiants est découragée ou supprimée: cela prive l’enfant Sourd d’une occasion d’acquérir une expérience et une compréhension politiques.

Élections Canada a fait de bons efforts pour améliorer l’accessibilité des élections aux personnes Sourdes, mais des problèmes demeurent avec le manque de programmation et de publicité politique sous-titrées à la télévision et sur les sites web. Il n’est pas difficile de diffuse en continu les débats électoraux sur Internet avec une interprétation facultative en langue des signes, cependant les sociétés de diffusion au Canada continue à se plaindre, faussement, au CRTC que cette technologie dépassent leurs capacités. Pour les élections provinciales et municipales, les personnes Sourdes doivent toujours amener et payer leurs propres interprètes aux bureaux de vote. Élections Canada s’efforce de changer cette situation en proposant l’interprétation vidéo à distance….pour l’élection fédérale de 2019 !

Les partis politiques du Canada n’ont fait aucun effort pour aborder les questions concernant les Sourds ou pour recruter des personnes Sourdes pour des candidatures. Lorsque les associations Sourdes ou les individus Sourds demandent à leurs représentants élus de se prononcer publiquement sur les questions touchant aux Sourds, ils le font généralement une fois, afin d’avoir « officiellement » défendu la cause des canadiens Sourds, ils ne mènent pas leurs projets à terme même si l’association Sourde ou la personne Sourde continue à demander, probablement parce que le représentant ne voit pas suffisamment de votes chez les Sourds.

Les associations locales de comté font particulièrement piètre figure dans la recherche et l’accueil d’une participation des Sourds. Aucun appui financier n’est accordé aux candidats ayant besoin d’interprètes, de sous-titrage en direct ou d’autres services de soutien. Même les conseils des écoles publiques découragent activement la participation des personnes Sourdes en prétendant qu’elles ne peuvent défrayer le coût des interprètes pendant les réunions.

Travailler pour le gouvernement fait aussi partie du processus politique. Selon le Conseil du Trésor fédéral, seulement 1,1 pour cent des employés fédéraux en 2001 étaient sourds ou malentendants. Cela est totalement inacceptable. La plupart de ces employés Sourds sont des employés de bas niveaux, des travailleurs temporaires et des employés à durée déterminée, une situation dans laquelle ils sont les « derniers embauchés, premiers mis à pied ». Tous les niveaux du gouvernement doivent prendre des mesures pour placer les travailleurs Sourds sur un pied d’égalité avec les travailleurs non-Sourds et leur donner de l’autorité.

L’Association des Sourds du Canada – Canadian Association of the Deaf a énoncé soixante recommandations pour action dans PAH! litics, y compris ce qui suit :

  • une intervention précoce devrait être fournie aux parents pour leur apprendre comment inclure leur enfant Sourd dans la politique familiale, et comment reconnaitre le rôle des politiques dans toutes les situations touchant à la surdité ;
  • il devrait y avoir des cours obligatoires de politique canadienne dans toutes les écoles (Sourde comme non-Sourde), enseignés par des professeurs formés et qualifiés pour l’éducation politique, et utilisant des méthodologies innovatrices et stimulantes ;
  • un pouvoir véritable devrait être conféré aux conseils étudiants, la participation à ces conseils ayant une valeur en crédits académiques ;
  • les universités devraient créer des études politiques orientées vers la surdité, et embaucher des personnes Sourdes pour les enseigner ;
  • les gouvernements devraient voter une législation forte et pro active exigeant une télédiffusion à contenu politique entièrement accessible, des pratiques d’équité en matière d’emploi dans les médias, et l’intégration d’une programmation et des questions Sourde(s) et/ou des handicapés ;
  • — un soutien financier et par des ressources devrait être fourni aux organisations de consommateurs Sourds et handicapés pour leur permettre d’effectuer les ateliers politiques nationaux non partisans pour leurs membres, au moins bis-annuellement (tous les deux ans) ;
  • la pleine accessibilité aux réunions et à l’information des partis politiques doit être fournie ;
  • les partis politiques devraient entreprendre le recrutement actif de membres et de candidats Sourds pour les élections ;
  • Élections Canada et les responsables provinciaux et municipaux des élections devrait fournir le remboursement à 100 pour cent des dépenses supplémentaires engagées pendant une campagne électorale par les candidats qui sont Sourds ou handicapés, peu importe le nombre de votes qu’ils reçoivent ;
  • il doit y avoir une plus grande représentation des personnes Sourdes et handicapées au gouvernement, à la fonction publique, dans le monde des affaires et les syndicats, dans les organismes de réglementation et les commissions ;
  • des programmes de formation pour les Sourds doivent être fournis dans les domaines de la conscience de soi, de l’affirmation de soi, de l’accès au pouvoir, de l’indépendance, de la participation, du leadership, de la gestion de réseaux, de l’analyse de l’information et de la mise en oeuvre.

C’est un commentaire triste sur la politique canadienne de constater que les résultats et les recommandations que nous avons faites voilà vingt ans (et après le passage de cinq premiers ministres) sont encore entièrement valides aujourd’hui.

Lecture recommandée : « PAH!-LITICS »: Deaf and Disabled Political Participation and Activity, par James Roots, Canadian Association of the Deaf, 1992

Lecture recommandée : The Politics of Visual Language: Deafness, Language Choice, and Political Socialization, par James Roots, Carleton University Press, 1999

APPROUVÉ : 3 JUILLET 2015

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS, CONTACTEZ :
L’Association des Sourds du Canada – Canadian Association of the Deaf
605 – 251 rue Bank
Ottawa (Ontario) K2P 1X3
(613) 565-2882
www.cad.ca