Le Problème :

Le taux de chômage des personnes Sourdes est à un niveau inacceptable. Il y a peu de Canadiens Sourds employés dans les professions et occupant des postes à « haute responsabilité ».

Notre position :

Les prétentions concernant « l’inemployabilité » des personnes Sourdes sont inacceptables. Les vraies causes du chômage élevé dans la communauté Sourde sont le paternalisme des entendants, une méthodologie éducative inadéquate et une discrimination systématique.

En 1998, nous avons effectué un sondage et un projet de collecte de données portant sur plus de 1 000 personnes de la communauté Sourde. Nous avons constaté que seulement 20 % des Sourds canadiens sont pleinement employés ; que 42 % sont sous-employés et que 38 % sont sans emploi.

En 2014-15, encore une fois, nous avons mené une enquête auprès de 365 Sourds canadiens, sous la supervision de l’ancien statisticien en chef, à la retraite, de Statistique Canada. Cette fois, 40 % des Sourds canadiens étaient au chômage, une augmentation de 2 % depuis 1998. Les 60 % restants étaient soit à leur propre compte ou des travailleurs avec un contrat de court terme, 24 % à temps partiel.

La hausse de chômage depuis 1998 correspond plus ou moins avec la hausse de chômage parmi la population en général. Cela veut dire, par contre, que le taux est toujours approximativement 32 % plus haut que le taux de chômage en général.

En 1998, moins de 6 % des personnes interrogées étaient à leur propre compte ; en 2015 ce chiffre a accru considérablement jusqu’à atteindre plus de 22 %. Nous attribuons cela à deux facteurs : (1) Internet et les communications/média électroniques dans leur ensemble a permis l’ouverture d’opportunités pour les Sourds canadiens de créer leurs propres emplois en tant qu’ingénieurs de logiciels, créateurs de jeux, entrepris en ligne, ou même simplement en achetant et en vendant avec eBay, Kijiji et d’autres plateformes semblables ; (2) les individus Sourds ne croient plus au gouvernement quant à la création d’emplois et ont renoncé aux combats nécessaires pour convaincre aux employeurs non -Sourds de les embaucher ; à la place, ils ont eu recours à subvenir à leurs besoins en servant leur propre communauté, soit avec des entreprises personnelles soit avec du travail à contrat.

Cette conclusion confirme les résultats de l’enquête de 1998 prouvant que la communauté Sourde est son propre meilleur employeur, particulièrement dans les domaines de l’éducation, des services sociaux, la technologie (par exemple, la conception et la gestion des sites Web), et les productions vidéo.

Il convient de noter que, comme la majorité des Canadiens non-sourds, les entrepreneurs Sourds perçoivent un faible revenu avec leurs entreprises. Une majorité – presque un tiers – gagnait moins de 15 000 $ par an, comparé au revenu moyen canadien de 37 313 $. Une petite 21 % des Sourds canadiens gagne plus de 50 000 $ par an.

La raison principale pour laquelle les personnes Sourdes réussissent à trouver du travail seulement dans la communauté Sourde est à cause des obstacles à leur participation à la société non-Sourde. Les employeurs potentiels peuvent être peu disposés à embaucher des travailleurs Sourds en raison d’idées préconçues que communiquer avec eux est « trop difficile » et que répondre à leurs besoins sur leur lieu de travail imposerait une contrainte financière. L’ignorance et un manque d’information conduisent aussi à ces prétentions fausses : par exemple, les employeurs ignorent souvent que le coût des interprètes est une dépense d’affaires déductible des impôts, et que d’autres moyens d’adaptation (tels que des alarmes visuelles) peuvent être subventionnés par des programmes fédéraux et provinciaux d’encouragement.

De telles attitudes font partie d’une discrimination systématique contre les demandeurs d’emploi Sourds ; elles font également partie de la discrimination contre la promotion des travailleurs Sourds à des postes de responsabilité et d’ancienneté. La représentation Sourde dans les professions et les postes de « haute responsabilité » (ou « haute puissance ») tels que les cadres de corporations est presque inexistante. Autant que nous sachions, le Canada ne compte que quatre ou cinq avocats Sourds, deux médecins Sourds, deux psychologues Sourds, et trois ou quatre professeurs d’université Sourd. Aucune des grandes entreprises de télécommunications ou des grandes institutions financières au Canada n’a d’employé sourd au niveau des cadres supérieurs ou de la direction. La majorité des quelques trente agences de services (y compris les nombreux bureaux) spécifiquement au service des personnes Sourdes sont dirigées par des directeurs généraux ou présidents/PDG non-Sourds. Seulement une des écoles pour les Sourds est dirigée par un directeur ou surintendant Sourd et aucun des départements provinciaux responsables de ces écoles n’a d’employé Sourd dans un poste décisionnel important.

La Commission de la fonction publique, qui est responsable de la plupart des employés du gouvernement fédéral, a rapporté que seulement 0,1 pour cent de la fonction publique fédérale est Sourde. En outre, la plupart sont des travailleurs avec des contrats (temporaires) à des postes manuels tels que des commis aux dossiers et du personnel d’entretien. Même ceux occupant des postes de fonctionnaire de « col blanc », comme des comptables ou dans le service des impôts, sont bloqués dans leur avancement par « l’impératif bilingue » exigeant la maîtrise de l’anglais et le français ; il n’est pas autant la question de l’impératif lui-même, mais le fait que la bureaucratie refuse de reconnaitre la maîtrise de l’ASL et la LSQ comme répondant à l’impératif bilingue.

En ce qui concerne les programmes de création d’emplois du gouvernement, le programme ayant le mieux réussi était celui de l’ASC-CAD. La stratégie nationale des emplois Sourds, une collection de programmes vers la fin des années 1990 a créé ou trouvé des emplois et a formé 100 Sourds canadiens dont la majorité est, étonnamment, toujours performante dans les domaines que nous avons cernés pour eux, 15 ans plus tard ! Naturellement, aucun niveau du gouvernement n’a contribué au financement pour continuer ou relancer cette stratégie ; ils doivent avoir honte de notre taux de succès à 100 % tandis que le taux de succès de leurs propres programmes de création d’emplois pour les Sourds canadiens se limite à des pourcentages à un chiffre.

The Canadian Association of the Deaf – Association des Sourds du Canada préconise les actions suivantes:

  • Le renforcement de la législation sur l’équité en emploi fédérale et provinciale, en respectant la Convention des Nations Unies sur les droits des handicapés.
  • Des campagnes agressives pour éliminer les préoccupations du monde des affaires concernant les frais liés aux mesures d’adaptation.
  • Un financement pour la communauté Sourde – en particulier pour les associations et entreprises gérées et contrôlées par des Sourds – afin de la permettre à employer, à former et à promouvoir les travailleurs Sourds.
  • Un partenariat juste et engagé entre les gouvernements et les associations Sourdes afin de travailler ensemble pour permettre aux Sourds canadiens de devenir plus employable, et, en particulier, pour déplacer plus de Sourds canadiens vers des postes de professionnels et de cadres.
  • Les programmes d’emploi fédéraux et provinciaux doivent mettre moins l’accent sur la création des possibilités de formation et plus sur la création d’emplois.
  • Le gouvernement fédéral en particulier doit donner l’exemple en augmentant drastiquement le pourcentage de personnes Sourdes dans sa propre main d’œuvre, notamment au niveau de la direction et les décideurs.
  • Tout particulièrement, les personnes Sourdes doivent avoir le contrôle de leurs propres institutions, y compris les écoles pour Sourds et les agences de services.

Lecture recommandée : The Employment and Employability of Deaf Canadians, par James Roots and David Kerr, Canadian Association of the Deaf, 1998

APPROUVÉ : 3 JUILLET 2015

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L’Association des Sourds du Canada – Canadian Association of the Deaf
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(613) 565-2882
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